Les EHPADs publics toujours en grande difficulté selon la FHF

Le seuil des 800 M€ de déficit est dépassé en 2023 : « c’est la pérennité de l’offre publique qui est en jeu »

Publié le 18 avril 2024

La FHF a réalisé une grande enquête auprès des EHPAD publics sur leur situation financière à fin 2023 qui confirme les tendances déjà observées en 2022. Malgré une activité qui continue à progresser, les EHPAD publics sont confrontés à une dégradation massive, rapide et profonde de leurs équilibres budgétaires. Une situation qui impose des réponses fortes et durables afin de préserver l'offre publique à destination du plus grand nombre et de l'adapter. Enquête complète en pièce jointe

UNE ENQUÊTE QUI CONFIRME LES GRANDES DIFFICULTÉS BUDGÉTAIRES DES EHPAD DU SECTEUR PUBLIC

La FHF a conduit une enquête en mars 2024 au sujet de la situation budgétaire des EHPAD publics relevant de la fonction publique hospitalière (FPH) au terme de l'exercice 2023.

Cette enquête a donné lieu à une participation sans précédent, avec plus de 730 EHPAD publics répondants, qu'ils soient autonomes ou rattachés à un établissement public de santé, représentant plus de 100 000 lits d'hébergement permanent dans l'ensemble des régions. Cela correspond à 43% des places d'EHPAD publics relevant de la fonction publique hospitalière.

Les principaux résultats sont les suivants :

  • Une activité qui continue à progresser, presque revenue à la normale pour une partie des EHPAD publics avec un taux d'occupation 2023 en moyenne de 94,4 %, en hausse d'un point par rapport à 2022.

  • Une généralisation des situations déficitaires alarmantes : près de 85 % des EHPAD enregistrent un résultat déficitaire pour l'exercice 2023, chiffre record alarmant, alors que la situation budgétaire des EHPAD publics était auparavant équilibrée. Les déficits sont généralisés, y compris dans les établissements qui ne connaissent pas de difficultés d'activité et en dépit des crédits exceptionnels mobilisés en 2023.

  • Un niveau de déficit moyen par place d'EHPAD qui s'aggrave fortement passant de 3 226 € en 2022 à un niveau record de 3 850 € en 2023. Appliqué à l'ensemble des EHPAD publics déficitaires, cela représente un montant d'environ 800M€ en 2023, en hausse de 60% sur un an.

Les conséquences à court terme pour les EHPAD sont des difficultés de trésorerie, avec un impact direct sur leur capacité à payer certaines charges. Cette situation limite les possibilités de recrutement et dégrade les capacités d'investissement.

DES DÉCISIONS S'IMPOSENT POUR SAUVER L'OFFRE PUBLIQUE, GARANTE DE L'ACCOMPAGNEMENT DE TOUS, ET LA PROJETER DANS L'AVENIR

Le Conseil d'administration de la Fédération Hospitalière de France (FHF), réuni le 3 avril 2024, a adopté à l'unanimité une motion proposant à l'ensemble des conseils d'administration ou de surveillance des EHPAD publics relevant de la fonction publique hospitalière d'alerter les pouvoirs publics quant à la situation budgétaire critique des établissements.

La FHF attend, à court terme, des pouvoirs publics :

  • une augmentation de 5% du forfait soin des EHPAD pour assurer le financement de la reconduction des moyens et des mesures nouvelles, notamment les 6 000 recrutements par an nécessaires pour atteindre l'engagement gouvernemental de 50 000 postes supplémentaires d'ici 2030,

  • une augmentation de 5% sur les tarifs hébergement administrés par les Conseils départementaux (tarifs à l'aide sociale),

  • l'engagement de la révision des règles socio-fiscales qui pénalisent les établissements et services médicosociaux publics par rapport au secteur privé.

En parallèle de ces mesures de court terme, la FHF appelle le Gouvernement à partager une feuille de route claire quant aux réformes à mener, conformément au souhait exprimé notamment par l'ensemble des parlementaires qu'une loi de programmation pour le Grand Âge soit élaborée au plus vite. Les modèles de financement doivent être refondés de A à Z, les recrutements doivent être programmés et l'offre développée et transformée pour répondre à la vague démographique et aux besoins des aînés.

Et il y a urgence.

Alors même que la France devra faire face à une vague démographique du Grand Âge sans précédent, ce qui suppose de créer plus de solutions d'accompagnement et d'investir, elle risque au contraire de voir disparaitre une partie de l'offre publique d'EHPAD, seule garantie, dans bien des territoires, d'une solution abordable pour l'ensemble des familles.

La situation impose des investissements, dont le financement public n'est certes guère aisé dans le contexte économique actuel. Pourtant, ne pas conduire une politique d'investissement ordonnée, cohérente et globale se traduirait inévitablement demain par une explosion des coûts pour les finances publiques. Les personnes qui ne seraient pas convenablement accompagnées verraient en effet leur état de santé se dégrader et leur accompagnement reposerait sur les familles, l'hôpital et les Urgences. C'est pourquoi un débat public est nécessaire pour dégager des choix clairs en matière de gouvernance comme de ressources, qu'elles soient publiques ou assurantielles.


Pour le président Arnaud Robinet

Le niveau de déficit des EHPAD publics a dépassé le seuil d’alerte, se situant à environ 800M€ en 2023, soit une hausse de 60% en un an. Cette situation impose une action nette et résolue. Ce qui se joue aujourd’hui, c’est l’adaptation de notre société, qui vieillit, aux besoins nouveaux des personnes. Une offre publique accessible partout est indispensable pour les personnes âgées, pour les familles, pour la société. Elle le sera plus encore demain. C’est pourquoi des mesures d’urgence doivent être prises, appuyées par une stratégie pluriannuelle claire, demandées par l’ensemble des acteurs et des parlementaires.